Interview de Laurence Bertels dans La Libre Belgique, page culture, de ce mardi 14 septembre 2010

Après trois semaines à Paris, l’Ecole du cirque arrive aux Halles. En coulisse, le ministre Doulkeridis fait avancer le projet pédagogique.

Salué par la presse hexagonale et bien entendu par la presse belge (cf. « La Libre » du 28/07.10), « Sorties 8,9,10 » a brillé tout l’été à la Villette. Programmé en ce haut lieu du cirque contemporain, le spectacle de l’Esac (Ecole supérieure des arts du cirque) reprenant des numéros d’élèves sortis en 2008, 2009 et 2010 a connu dans la capitale française une résonance particulière.

Les quinze artistes, français pour la plupart, mais aussi belges ou finlandais, ont en effet opté, sous la houlette du metteur en piste Olivier Antoine et en musique, Olivier Rijckaert, pour une belgitude bienvenue, voire émouvante, à l’heure des déchirements de notre petit pays. L’ambiance kermesse, gaufres en string et filles du bord de mer ont séduit les Français aux yeux desquels la Belgique bénéficie toujours d’un véritable capital sympathie. D’autant qu’au bal musette, à l’autodérision, aux bourgeois cochons et à la nostalgie est venue se greffer la rigueur artistique.

Pas de doute, à les voir embrasser leur roue Cyr, s’élancer au trapèze, danser sur le fil ou jongler avec leur diabolo, ces jeunes circassiens ont prouvé qu’ils portaient de réelles propositions artistiques. Le public, lui non plus, ne s’y est pas trompé et est venu en nombre. « Loin de se contenter de la performance, les jeunes pousses gonflent leurs avantages Au total, un joyeux et frais déballage venu de Belgique qui ne se prend pas au sérieux » pouvait-on lire dans « Libération ».

Même Christos Doulkeridis, ministre-président du collège de la Cocof en charge de l’Enseignement, s’est laissé émouvoir par le spectacle lors de la première à Paris et a tenu à s’exprimer à ce sujet à l’heure où les Halles de Schaerbeek programment « Sorties 8,9,10 » en ouverture de saison. Le spectacle de l’Esac ira ensuite à la maison de la Culture de Tournai, un lieu culturel qui s’intéresse, lui aussi, de près au cirque contemporain.

« On parle peu de l’Ecole du cirque car, vu son activité, elle ne compte qu’un petit nombre d’étudiants. Pourtant, elle est reconnue à l’étranger et figure parmi les trois écoles supérieures de cirque les plus importantes au monde. On lui reconnaît une identité. Sa présence à Paris cet été a rassemblé un public important. Le fil conducteur du spectacle jouait sur la fibre belge même s’il ne s’agit pas d’une école de Belges, puisque 49 des 55 étudiants actuels viennent d’autres contrées; mais, comme Bruxelles, l’Esac revêt une dimension européenne » se réjouit le ministre tout en cherchant à valoriser l’art circassien auprès des étudiants de notre pays. D’où la mise sur pied, dès cette année académique, d’un stage préparatoire qui donnerait aux candidats plus de chances de réussir l’examen d’entrée et de savoir si le projet pédagogique, plus axé sur le numéro et l’autonomie, de Gérard Fasoli, directeur de l’Esac, leur convient.

Une journée d’introduction sera organisée le 26 septembre et le premier des cinq week-ends programmés aura lieu les 9 et 10 octobre. Avis aux amateurs. L’initiative vise à jeter des ponts entre les écoles de loisirs de cirque en Belgique, beaucoup moins nombreuses qu’en France, de permettre à davantage de jeunes francophones d’entrer à l’Esac – étant donné que ce genre de module préparatoire existait déjà en Flandre – et de se concentrer sur les formateurs pour créer une cohérence pédagogique entre les écoles de loisirs et l’Ecole supérieure des arts du cirque, reconnue par la Communauté française en 2003. Concrètement, il s’agirait donc d’un module de dix jours de formation étalé sur plusieurs week-ends pendant l’année scolaire et destiné, par exemple, aux rhétoriciens désireux d’embrasser une carrière dans les arts du cirque. Rien de révolutionnaire, mais un premier pas efficace et important qui pourrait – qui sait ? – mener ensuite à la création d’humanités cirque en Belgique.

« Nous établissons une collaboration avec Circus Centrum, le centre flamand des arts du cirque. Cette collaboration entre les deux communautés est essentielle. Pour le cirque, pour la danse, il y a beaucoup à faire entre les deux communautés et j’espère que le développement dans le monde du cirque aura des répercussions dans d’autres disciplines ». Conscient du fait qu’il tient un discours allant à l’encontre des actuelles querelles politiques, Christos Doulkeridis estime que travailler dans des logiques de collaboration comme celle-ci peut fonctionner dans la Belgique de demain. « Il est intéressant de prendre du recul et de voir ce qu’est notre réalité. C’est une question d’attitude, d’esprit, de volonté et de structures. Il y aura toujours une identité belge » conclut le ministre bruxellois.

Laurence Bertels

Infos : 02.675.68.84 ou www.esac.be.


Aux Halles de Schaerbeek, les 15 et 16 septembre. Infos : 02.227.59.60 ou www.halles.be

Tournai, à la maison de la Culture, le 8/10 à 20h00. Infos. : 069.25.30.70