Vous trouverez ci-dessous le discours que j’ai prononcé à l’occasion de la réception que j’ai organisée en tant que Président du Parlement francophone bruxellois pour la fête de la Communauté française. Cette soirée a rassemblé près de 700 personnes issues du monde institutionnel et associatif. De nombreux ambassadeurs étaient également présents à cette occasion. Dans mon discours, j’insiste sur la nécessité de renforcer les liens entre Francophones du pays et entre les Bruxellois francophones et néerlandophones à un moment où la Commission communautaire française (l’institution francophone bruxelloise) se trouve dans une situation bugétaire difficile. En effet, celle-ci doit combler un trou de 30 millions d’euros en 2006. Au-delà de ce chiffre, ce sont des politiques essentielles pour les Bruxellois qui sont directement menacées : accueil de la petite enfance, des personnes handicapées ; la formation professionnel ; la culture … Ce discours m’a aussi donné l’occasion de rappeler l’importance pour notre Parlement de poursuivre et intensifier son travail de citoyenneté.
Mesdames et Messieurs, en vos titres et qualités, Chers amis,

Je vous souhaite, au nom des membres du bureau du Parlement francophone bruxellois, à toutes et à tous, la bienvenue pour célébrer ensemble, avec quelques heures d’avance sur l’agenda officiel, la fête de la Communauté française.

Avant d’aller plus loin dans mon discours, je voudrais commencer par rendre un hommage à deux hommes : Eric André et Joseph Parmentier. Un Parlement vit avec le travail, les interpellations et les propositions que les femmes et les hommes qui le composent fournissent jour après jour. Eric André et Joseph Parmentier n’ont jamais été en reste dans ce domaine. On peut dire qu’ils ont contribué de façon permanente, chacun dans son style, à nourrir le travail parlementaire et donc à faire vivre la démocratie. L’un et l’autre nous ont quitté durant l’été frappés par la maladie. En l’honneur de leur mémoire, je vous propose de garder le silence quelques instants.

Mesdames, Messieurs, Nous vous avons invités à des titres divers : que vos titres soient officiels ou non, vous faites vivre cette Communauté de langue française à Bruxelles ou ailleurs dans le monde. Et cette fête est donc la vôtre.

Il y a parmi vous des femmes et des hommes qui travaillent quotidiennement dans les secteurs de notre institution : petite enfance, enseignement, culture, formation professionnelle, santé, aide à la jeunesse, aide aux familles, aux personnes handicapées, tourisme… et j’en passe. Cette fête est aussi là pour vous rendre hommage.

Il y a aussi parmi vous celles et ceux qui représentent un pays ou une région quelque part dans le monde et qui nous font l’honneur de votre présence. Je voudrais chaleureusement les en remercier.

Plus particulièrement, nous nous sommes permis de mettre un pays un peu plus à l’honneur cette année : la Roumanie. Pour saluer le programme de coopération signé au mois de mai dernier dans le cadre de la 3è commission mixte entre la Roumanie, d’une part et la Communauté française, la Région wallonne et notre Commission communautaire représentée par notre Ministre des Relations Internationales, Madame Françoise Dupuis, d’autre part. Ce programme couvre la période 2005-2007, période de toute première importance pour la Roumanie puisqu’elle verra ce pays accueillir le XIe Sommet francophone durant l’automne 2006 et accéder à l’Union européenne le 1er janvier 2007. La coopération bilatérale s’inscrit dans ce contexte. Les projets retenus s’articulent autour des thèmes suivants : la diversité culturelle et le plurilinguisme, l’environnement dans la perspective de l’adhésion, l’intégration sociale et la coopération scientifique. C’est donc un groupe de musique roumaine qui vous a accueilli à votre arrivée : il s’agit du groupe ROMA LUCA que je nous propose d’applaudir.

Nous fêtons donc la Fête de la Communauté française. Deux notions essentielles se retrouvent derrière ces mots. Derrière celui de « Communauté », il y a la notion d’appartenance à un groupe dont on partage des points communs : un patrimoine, une culture, des traditions, souvent une Histoire… Le terme « française » indique que ce partage se fait autour d’une même langue : le français.

Paradoxal concept que celui de la langue. Parler une langue commune permet le dialogue, la compréhension, la complicité, la construction de projets communs, l’évolution des relations, l’ouverture, l’échange, la confrontation, l’amour, la haine. Tout peut s’exprimer entre personnes pratiquant la même langue. Alors pourquoi ne pas se mettre d’accord pour parler tous la même langue ?

Qui serait prêt à sacrifier sa langue au nom de toutes ces valeurs ? Personne. Parce que la langue est bien plus qu’un outil de communication. C’est un patrimoine culturel, identitaire. Qui évolue et qui doit évoluer au contact des autres, que l’on peut partager mais que l’on ne peut jamais abandonner et ce, même pour les raisons les plus positives qui soient. Parce que nous aurions alors le sentiment d’abandonner une partie de nous-même en abandonnant notre langue. C’est la raison pour laquelle nous soutenons toutes celles et ceux qui se battent pour faire vivre ou défendre leur langue, et ce d’autant plus que nous sommes dans un monde où la tendance exige dans tous les domaines l’uniformisation, la standardisation. Parmi eux se trouvent dans cette salle Monsieur VUILLARD, Vice-président du Parlement du Jura et Monsieur Ego PERONE, Président du Conseil de la Région de Val d’Aoste, dont je salue la présence ici ce soir.

Mais à côté de la promotion de notre langue, nous devons aussi consacrer une bonne partie de nos énergies à mieux connaître la langue et donc l’identité de nos voisins les plus proches. Parce que ne pas connaître la langue de l’autre, c’est s’enlever une opportunité de dialoguer avec l’autre en le comprenant mieux. Tant il est vrai qu’il est plus facile d’avoir peur, de se méfier, d’ignorer ou même de mépriser celle ou celui que l’on ne connaît pas.

Il doit donc y avoir dans notre Communauté française autant de forces pour promouvoir notre propre culture et ses inévitables évolutions que de forces pour accepter et découvrir celles des autres.

Le respect et la tolérance sont deux valeurs essentielles à nos yeux. Et, dans ce domaine nous essayons de passer à l’acte le plus souvent possible. Chaque année, notre Parlement entreprend ce qu’il appelle des actions citoyennes avec les écoles de la Région bruxelloise. Cela a été initié par mes prédécesseurs. C’est devenu une spécialité de notre Parlement que nous voulons poursuivre, développer et élargir.

Nous donnons donc depuis quelques années la possibilité aux écoles d’aller visiter avec leurs classes le Fort de BREENDONCK ou l’ancienne Caserne DOSSIN à Malines, lieux de mémoire honteuse pour notre pays d’où sont partis sans jamais revenir des milliers de Belges durant la deuxième guerre mondiale.

Nous organisons cette initiative en collaboration avec l’Institut des Invalides de Guerres et nous comptons bien la poursuivre parce que si nous célébrions cette année le 60è anniversaire de la libération des camps, qui peut dire aujourd’hui que la haine d’hier n’est plus présente aujourd’hui et ne pourrait pas reproduire ici ou ailleurs ses mêmes horreurs. J’ai assisté hier avec énormément d’émotions à la cérémonie organisée par l’Union des Déportés Juifs en Belgique. Parmi les témoignages des victimes juives et tziganes, une place avait été laissée à un représentant Tutsi venu décrire les horreurs analogues vécues par son peuple il y a un peu plus de 10 ans. Nous devons poursuivre avec détermination parce que les insultes « sale juif ou sale arabe » reviennent avec une banalisation inacceptable dans nos cours de récréation ou sur les murs de certains de nos quartiers.

Nous allons aussi développer ces actions. Parce qu’avec le temps nous n’aurons bientôt plus aucun témoin direct de cette période. A nous d’organiser le passage de relais de la mémoire avec les nouvelles générations en permettant à des jeunes de devenir à leur tour des passeurs de mémoire.

Et toujours dans ce souci de respect de la mémoire, le bureau du Parlement francophone bruxellois a décidé d’élargir ces actions envers d’autres oubliés de l’Histoire. C’est ainsi qu’à partir de cette année, notre Parlement organisera aussi des visites de la Nécropole de Gembloux où se trouvent enterrés les tirailleurs marocains qui ont participé à cette même seconde guerre mondiale.

Permettez-moi à présent d’aborder un peu plus précisément la situation de notre institution en lien avec son actualité. Comme je l’ai dit tout à l’heure, la Commission communautaire française s’occupe de matières extrêmement importantes et concrètes pour les Bruxellois : petite enfance, enseignement (en partie), formation professionnelle, aides aux familles, aux personnes handicapées, tourisme, etc. Nous ne sommes pas une institution isolée. Ce que nous faisons ou ne faisons pas à des conséquences directes sur l’ensemble des politiques menées par les autres institutions. Pour donner un exemple : si nous ne réussissons pas à mener une bonne politique de formation professionnelle, qui est de notre compétence, nous ne permettrons pas de mener la meilleure politique d’emploi à Bruxelles, ce qui est de la compétence de la Région. Je veux dire par là que toutes les politiques sont imbriquées en Belgique, qu’on le veuille ou non. Et que cela implique tant une coordination qu’une solidarité indispensable entre tous les niveaux de pouvoir.

Dans ce sens, il est évident que tous les Ministres de la Région bruxelloise doivent s’inquiéter de ce que les commissions communautaires aient les moyens de mener à bien les politiques qui sont de leurs responsabilités et éviter de tomber dans les discours parfois poujadistes que j’ai entendu ces dernières semaines. Réussissons ensemble Bruxelles. Ce n’est qu’ensemble que nous réussirons Bruxelles.

D’un autre côté, je voudrais rappeler à nos deux autres partenaires de l’espace francophone, la Région wallonne et la Communauté française, que le Gouvernement et le Parlement francophones bruxellois ont toujours marqué leur solidarité avec la Communauté française lorsque celle-ci se trouvait dans des situations budgétaires plus difficiles. Et ce, en prenant à notre charge un effort plus important que celui qu’une répartition juste aurait exigé. Il ne faudrait pas aujourd’hui que cet effort de solidarité se fasse sur le dos des politiques que nous devons mener dans le cadre de nos propres compétences. A l’heure où nous nous retrouvons à notre tour dans une situation budgétaire difficile, chacun comprendra, je l’espère, que nous défendions que la solidarité entre partenaires ne puisse pas aller que dans un seul sens.

Qu’il me soit autorisé en ce jour de fête de ne pas entrer dans le détail des chiffres et qu’il me soit aussi pardonné d’avoir versé un tout petit peu dans le discours institutionnel et communautaire sans lequel, vous le savez bien, il n’y aurait pas de véritable fête de la Communauté française en Belgique.

Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques mots que je tenais à vous livrer en vous souhaitant une nouvelle fois : bonne et joyeuse fête de la Communauté et de la langue française.