Interview de Katia Belloy pour Ho.Re.Ca Journal du mois de novembre 2009

Le tourisme reste aux mains des verts. En effet, après le mandat d’Evelyne Huytebroeck, c’est au tour du Ministre bruxellois, Christos Doulkeridis, de reprendre le flambeau. Ce ministre Ecolo estime que nous pouvons considérablement améliorer l’image de notre capitale, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays et que nous devons nous consacrer davantage à une politique durable en matière de tourisme.

Christos Doulkeridis n’a pas mâché ses mots pour souligner l’importance du tourisme : « Le tourisme, auquel est également apparenté l’horeca, est créateur d’emplois. Il s’agit du plus important employeur de la région bruxelloise et pourtant, force est de constater que les autorités n’ont jamais estimé ce secteur à sa juste valeur, ces dernières années ! Il n’est que peu mentionné dans les déclarations gouvernementales, alors qu’à Bruxelles, il représente quelque 20 % du produit national brut ! »

Quels atouts souhaitez-vous jouer pour mettre en avant le tourisme à Bruxelles ?

« Il faut surtout revoir l’image de notre capitale, la rendre plus attractive. Le nom de Bruxelles est plus connu que n’importe quel autre nom de pays des Etats membres de l’Union européenne. Il s’agit d’un atout énorme, que nous devons exploiter. »

Il s’agit, par ailleurs, de la capitale de l’Europe.

« Exactement et l’on ne se sert que trop peu de ce statut. Il s’agit de la capitale de l’Europe mais également de la ville où l’OTAN et d’autres institutions sont installées.
Malheureusement, les citoyens européens ont une image beaucoup trop administrative et bureaucratique de Bruxelles, alors que notre capitale est en fait trépidante. Pour tout Européen, Bruxelles est sa seconde capitale. Nous devons cultiver cette idée. Si nous n’entretenons pas l’Europe comme une entité, nous allons perdre du terrain par rapport au reste du monde. L’Europe est importante. Nous devons donc veiller à ce que les générations futures prennent davantage conscience de leur identité européenne, ce qui est la seule façon de garantir leur avenir. Actuellement, nous restons un continent riche mais si nous ne consolidons pas cette position, nous ne tarderons pas à la perdre. Nous devons nous tourner vers la jeunesse pour garder un continent jeune. »

Vous soulignez l’importance de l’Europe comme institution. Mais comment faire étinceler Bruxelles au sein de cette Union ?

« En s’assurant que chacun apprenne à mieux connaître la ville. Inciterles jeunes à visiter au moins une fois Bruxelles pendant leurs années d’école me paraît une excellente idée. Qu’ils soient Flamands, Wallons, Italiens, Portugais ou Suédois, cela devrait faire partie de leur « Bruxelles,la seconde capitale des Européens » programme scolaire. Nous devons redoubler d’efforts et promouvoir l’hospitalité de notre capitale vis-à-vis de ces jeunes. Cela profitera à l’image de Bruxelles et tout le monde sera gagnant. En outre, il s’agit d’un travail axé sur l’avenir : peut-être que le jeune qui a apprécié sa visite reviendra plus tard, en tant qu’adulte, avec sa famille. »

L’image de Bruxelles est-elle trop négative à l’heure actuelle ?

« Nous ne jouons pas assez sur l’attractivité de Bruxelles. Beaucoup de choses sont déjà en place mais nous pouvons encore travailler davantage pour améliorer notre hospitalité et notre identité positive. »

La gastronomie fait-elle partie de cette identité positive ?

« Bien sûr. Bruxelles choisit toujours des années à thème pour promouvoir le tourisme. Ma prédécesseur,Evelyne Huytebroeck, a réalisé un excellent travail dans ce domaine. 2012 sera l’année de la gastronomie.Un choix justifié. »

La gastronomie permet-elle à Bruxelles de se différencier ?

« A Bruxelles, on mange bien et à bon prix, c’est l’avis de tous. La gastronomie joue un rôle important lors du choix d’une destination de voyage. A nous de jouer là-dessus. »

Comment voyez-vous la collaboration avec FED. Ho.Re.Ca Bruxelles ?

« Nous devons conduire un dialogue à tous les niveaux. Il y a malheureusement eu quelques incompréhensions entre le secteur et les écoles hôtelières. Ces dernières estiment que les restaurateurs ne consacrent pas assez de temps à la formation des jeunes. De leur côté,les exploitants horeca se plaignent du manque de formation dans les écoles. C’est un problème qu’il nous faut résoudre. Il est inconcevable que dans une ville comme Bruxelles, où le chômage est si présent, le secteur horeca ne trouve pas assez de personnel qualifié. A cet égard, les autorités doivent travailler en collaboration avec la Fédération. »

Qu’entendez-vous par tourisme durable ?

« Le tourisme durable est un tourisme de qualité, un tourisme qui offre une plus-value. C’est le tourisme du futur. La problématique environnementale a également son importance. Faut-il encourager les gens à prendre l’avion vers des destinations lointaines, alors que tout est possible à proximité ? Il faut donner l’envie aux Bruxellois, aux Flamands et aux Wallons d’être des touristes dans leur propre capitale et c’est possible, par le biais d’actions concrètes. La récente Slow food week était une excellente idée. Plusieurs acteurs étaient concernés, notamment les producteurs et les restaurants. Lorsqu’un restaurateur connaît le produit qu’il utilise sur le bout des doigts, c’est fantastique. Je crois que la Slow food regorge d’opportunités, également pour l’enseignement. Une grande école hôtelière, comme le CERIA, pourrait devenir la première école de Slow food européenne. En d’autres termes, l’importance de la qualité des produits sera soulignée aux élèves dès le début, ce qui donnera une dimension supplémentaire à leur qualification. »

« Le nom de Bruxelles est plus connu que n’importe quel autre nom de pays des Etats membres de l’Union européenne. Il s’agit d’un atout énorme, que nous devons exploiter »

Quelles sont vos attentes par rapport au nouveau centre de congrès Square, récemmentouvert ?

« L’énorme avantage qu’a Square par rapport à d’autres centres de congrès est qu’il est situé au beau milieu de la ville, à deux pas de l’un des plus beaux endroits du pays : la Grand Place. Tout est à proximité : les bâtiments historiques,les musées mais également les commerces et les établissements horeca. Dans un premier temps, les congressistes viennent pour assister au congrès, bien sûr mais ils ne passent pas toute la durée de leur séjour entre les murs du centre de congrès ! L’horeca en profitera donc de manière indirecte. Square affiche déjà complet pour les prochains mois. Il est important de tisser des liens entre toutes les activités de la ville car elles peuvent s’influencer mutuellement, de façon indirecte. »

Bruxelles est-elle trop dédiée au travail ?

« Absolument. Beaucoup de gens ne connaissent que le trajet vers leur travail. Pourquoi ne pas rester un peu plus longtemps ? Ou passer un weekend dans la capitale ? Bruxelles doit se pencher là-dessus, notamment en rendant ses “points d’entrée”plus attractifs. Prenez quelqu’un qui arrive en train, il faut l’inciter à découvrir la ville. Bruxelles dispose d’une vie culturelle très riche maishélas, les non-Bruxellois l’ignorent. Seules les grandes expositions sontconnues mais cela se résume à arriver en car au Cinquantenaire, pour repartir immédiatement après. Quel gâchis ! Il faudrait encourager ces gens à rester en ville pour aller manger un morceau, boire un verre ou assister à une autre activité culturelle. »

Comment voyez-vous la collaboration avec la Flandre et la Wallonie ?

« A l’heure actuelle, les choses sont plus aisées en Wallonie car nous sommes groupés au sein de l’Office de Promotion du Tourisme (OPT).Nous avons des contacts avec le Ministre wallon du Tourisme, qui approuve l’idée de créer davantage de synergie. J’entends également développer cela avec les Flamands. Pour mener un dialogue, il faut deux parties. Je sais que les Bruxellois connaissent mal la Flandre et pas bien la Wallonie. L’inverse est également vrai. Nous devons y remédier ensemble et je respecterai mes interlocuteurs. Les possibilités sont nombreuses. »

Katia Belloy
pour Ho.Re.Ca Journal, le journal officiel des fédérations Ho.Re.Ca Bruxelles, Wallonie et Flandre.