ag manifesteAu terme d’un processus qui a duré six mois, Ecolo vient d’adopter son nouveau manifeste. Ce texte, c’est l’ADN du parti, les valeurs que nous partageons. Le précédent manifeste d’Ecolo avait été écrit dans les années 80. Il était essentiel de pouvoir l’adapter à la société telle qu’elle a évoluée aujourd’hui. A travers ce manifeste, Ecolo affirme sa volonté de changer de modèle, de moderniser notre société, avec un objectif central : une plus grande justice sociale. Pour Ecolo, il n’y a pas de fatalité et ce texte se veut porteur d’espoir.

Depuis la création d’Ecolo, les écologistes ont eu une intuition remarquable. Laquelle? Si on continue à surconsommer de la même façon, si on laisse les inégalités grandir entre les personnes et entre le Nord et le Sud, on se dirige droit dans le mur. Aujourd’hui, face à ce constat, beaucoup de choses ont changées. Après avoir été précurseurs sur les constats, Ecolo l’est devenu sur les réponses à apporter. En Région Bruxelloise, en Région Wallonne ou en Fédération Wallonie-Bruxelles, quand les choses bougent, Ecolo n’est jamais très loin. On le voit au quotidien dans le travail qui est réalisé dans les majorités auxquelles nous participons:

  • A Bruxelles et en Wallonie, les écologistes œuvrent pour permettre une indépendance énergétique et diminuer la consommation énergétique des citoyens.
  •  En Région bruxelloise, je mène un travail important pour construire de nouveaux logements publics et rénover les logements existants.
  • Philippe Henry mène des réformes dans le cadre du plan d’aménagement du territoire pour éviter l’étalement urbain et préserver les terres agricoles en Wallonie.
  • Nous engrangeons de nombreuses avancées en matière de transparence et de non-cumul.

Il est essentiel de revaloriser le politique en mettant en avant les valeurs de solidarité entre les personnes qui se trouvent sur le même territoire, de solidarité entre nous qui trouvons dans nos pays et les pays qui se trouvent dans une situation économique beaucoup plus difficile.

La société dans laquelle nous vivons aujourd’hui est celle de l’obsolescence programmée or, il faut se diriger vers une société de la durabilité programmée. Cela signifie qu’il faut que l’impact environnemental de ce que nous produisons diminue, que nous poursuivions la transition énergétique de notre société et que nous soyons moins dépendants d’une série de ressources énergétiques comme le pétrole ou l’uranium.

Mon interview de ce lundi 24 juin à Matin Première:

http://www.rtbf.be/radio/podcast/player?id=1834215&channel=lapremiere

Pour lire la retranscription de l’interview, c’est ici

Retranscription de l’entretien:

GL : Notre invité ce matin, c’est donc Christos Doulkeridis qui va nous dire à quoi ressemblera l’Ecolo de demain puisque les Verts viennent d’adopter un nouveau Manifeste, le programme était devenu ringard ?

CHD : En fait, ça fait quelques années évidemment qu’on s’est adapté à la société telle qu’elle évolue. Cependant, il est vrai que le dernier Manifeste datait d’une époque où je n’avais même pas encore 20 ans…

GL : De 1985.

CHD  : Il est quand même intéressant  de se rappeler quelle intuition redoutable il contenait déjà à l’époque et même quelques années auparavant, lorsqu’Ecolo a été créé.

GL : Quelle intuition ?

CHD : L’ intuition que si on continue à consommer de la même manière, si on continue à avoir des relations aussi inéquitables entre les personnes, dans un même pays, entre les personnes de différents continents, on va droit dans le mur.  Cette intuition est toujours pertinente aujourd’hui. Les Ecologistes à l’époque, qui venaient de mouvements associatifs, féministes, syndicalistes, associatifs, environnementalistes, pacifistes, voulaient en fait se positionner sur un terrain politique, en valorisant aussi l’action politique. Parce que c’est de là aussi que le changement doit venir. A l’époque, on n’avait sans doute avec pas encore beaucoup d’expérience, nos discours  étaient peut-être un peu trop incantatoires. En tout cas, les discours  sentaient que les choses devaient changer mais  les réponses  n’étaient pas encore construites sur base d’une expérience, d’une confrontation avec les réalités du terrain. Comme c’est le cas aujourd’hui.

GL : Discours incantatoires, est-ce que c’est ça qui va changer ? Qu’est-ce qui change, est-ce que c’est une révolution, ce Manifeste ?

CHD : On garde la base et en même temps, on sent bien qu’on doit évoluer. Cette société aujourd’hui évolue de manière extraordinaire, on le sent très, très bien, ne fût-ce que dans notre vie. La place que prennent les nouvelles technologies de l’information est extraordinaire, quasi incontournables. Les choses ont évolué à une vitesse qui est vraiment très importante. Quand on regarde nos villes, quand on regarde nos campagnes, ce n’est pas exactement la même chose que fin des années 80. Et donc il fallait, à un moment donné, se mettre ensemble, en associant des partenaires qui sont à l’extérieur du mouvement, qui n’ont pas leur carte de parti mais qui  se rendent compte qu’il est indispensable de pouvoir valoriser le politique. Pour ce faire,  Ecolo peut venir avec des réponses constructives, qui ne sont  pas là  simplement pour critiquer, qui ne sont pas là simplement pour chercher des ennemis ou chercher des coupables mais qui viennent aussi avec un peu d’espoir, l’espoir de pouvoir construire une société dans laquelle les gens peuvent se retrouver les uns avec les autres, autour de combats communs pour construire peut-être une société meilleure.

GL : Oui, de ce que je lis, de ce que j’ai pu lire en tout cas des extraits de ce Manifeste et des commentaires dans la presse, beaucoup de bonnes intentions, aucune mesure concrète ?

CHD : Parce qu’un Manifeste n’est pas un programme, c’est ça la différence entre les deux.  Le Manifeste, c’est un peu l’esprit dans lequel on veut travailler, les valeurs qu’on veut mettre en avant . On retrouve dans ce Manifeste les valeurs de solidarité entre les personnes, de solidarité entre nos pays et des pays qui se trouvent dans des situations économiques encore beaucoup plus difficiles. On doit se rendre compte qu’il y a un lien entre ce que nous vivons ici et ce que les autres vivent ailleurs. Fermer les yeux et être simplement tournés autour de notre nombril, constitue complètement une impasse. Il est essentiel justement de pouvoir se mettre d’accord sur des valeurs, par exemple l’égalité entre les femmes et les hommes et toute une série d’autres perspectives qui apportent justement un souffle,  un guide sur ce qu’est l’écologie aujourd’hui.

GL : Pourquoi, c’est important ? Je disais, beaucoup d’ambition, peu de mesures concrètes et l’ambition va même très loin puisque si je reprends les commentaires de votre co-présidente Emilie Hoyos, on va changer la marche de ce siècle, c’est plutôt ambitieux, les Ecolos de Belgique, fer de lance d’un nouveau monde, c’est ça ?

CHD : Pourquoi est-ce  important de se positionner sur cet axe-là ? Parce qu’aujourd’hui, la société est  bouchée à plus d’un titre, tant au niveau belge, qu’au niveau européen. On sent bien les impasses. Et on les met régulièrement en évidence. C’est normal, puisqu’on sent bien qu’on est en train de vivre quelque chose de spécial. Le politique perd de plus en plus de sa place, de son pouvoir, de sa marge d’action. Il est essentiel donc de revaloriser le politique mais pas de n’importe quelle façon. Il faut que le politique soit vertueux. Il faut que le politique fonctionne de manière transparente. Il faut qu’il rende des comptes à la population, il faut de la participation. Le politique n’est plus le seul à pouvoir décider, il doit décider en concertation avec les populations. Donc, les Ecologistes – qui ont toujours mis cette éthique en avant –  ont une nouvelle responsabilité par rapport à la société telle qu’on est en train de l’affronter, ici en Belgique, mais aussi ailleurs en Europe.

GL : Alors  7 à 800 militants présents hier, un vote contre, un seul et une abstention, c’est presque un vote stalinien, ça,

CHD : Oui, j’ai été surpris.

GL : Ecolo qui se dit si démocratique… il n’y a pas beaucoup de contestations ?

CHD : J’ai été surpris moi-même. Pourquoi sommes-nous arrivé à un tel résultat ? Parce que le processus démocratique ne se résume pas à un seul moment. Ce n’est pas le moment de l’assemblée générale où on vient et où on vote mais tous les moments qui ont précédé. Cela fait 6 mois qu’on travaille sur ce texte-là avec une forte participation. Ce n’est pas le texte des co-présidents ou des Ministres qui seraient venus proposer leur propre texte. Cela  s’est co-construit, avec des militants, avec des gens qui étaient de l’extérieur. Près de 300 amendements  ont été déposés par les militants. Et ces amendements ont été discutés pendant de nombreuses réunions et, finalement, l’assemblée générale a acté un point de consensus qui était effectivement extrêmement large.

GL : Je reprends quand même la contestation puisqu’on a pu lire une Carte blanche, il y a quelques jours dans la presse, d’un militant qui s’oppose à ce Manifeste, visiblement, il estimait lui que ce parti n’avait plus rien d’écologiste. Alors Ecolo parti écologiste, est-ce que la défense de l’environnement est encore votre ADN, par exemple, on ne parle plus de développement durable apparemment ?

CHD : Doit-on valoriser la prise de position d’une seule personne sur les 800 qui se sont exprimées? Cette position, on l’a largement lue et largement entendue. Je pense que ce serait ridicule finalement de mettre en avant essentiellement cette critique-là. On vit dans une société de l’obsolescence programmée. Or, on doit basculer dans une société de la durabilité programmée. Il faut que ce que ce que nous produisons réduise son impact écologique. Il faut  absolument valoriser la transition énergétique que nous sommes en train de construire. On doit être moins dépendant du pétrole, de l’uranium, de toute une série d’énergies qui sont marchandées par des Etats comme la Russie, comme les pays arabes. On ne peut plus être dépendant comme on l’est depuis des années maintenant, par rapport à ce type de pays, par rapport à ce type de régimes et par rapport à ce type d’énergies. Et donc on doit construire cette transition, les Ecologistes sont évidemment  à l’avant pointe de ces discussions, de ces propositions et de ces actions là où on prend aussi nos responsabilités notamment en Région Wallonne et en Région Bruxelloise.

GL : Christos Doulkeridis, pour que les choses soient bien claires pour les auditeurs, on sait qu’Ecolo est un parti à gauche, avec ce nouveau Manifeste, est-ce que vous êtes un peu plus à gauche ou un peu moins à gauche ?

CHD : On prend simplement conscience que notre responsabilité est de lutter contre les discriminations. Que l’exploitation humaine qui se base souvent sur l’ignorance ou des rapports de force, doit être combattue de manière nouvelle. On n’est plus dans des logiques de gauche des siècles derniers. En utilisant la créativité, les relations qui doivent exister entre citoyens et politiques et entre les citoyens eux-mêmes, on est justement dans la construction de quelque chose de nouveau. Les questions d’égalité sont extrêmement importantes et elles l’ont toujours été pour les Ecologistes. Mais on ne peut jamais se reposer sur ses lauriers. Il faut sans cesse être capable de remettre l’ouvrage sur le métier pour pouvoir construire de nouvelles solidarités, renforcées, qui ne se basent pas simplement sur la défense d’acquis tels qu’ils ont pu exister mais qui tiennent compte aussi de l’évolution de la société et de ses besoins.

GL : D’accord, on l’a bien compris, ça, c’est le message d’Ecolo. Mais visiblement, il y a eu quelques corrections, tout de même, quelques aménagements de dernière minute, au départ, le texte disait, Ecolo est un parti qui devait agir et exercer le pouvoir, le passage a finalement été gommé, pourquoi ?

CHD : C’était un passage un peu bizarre. Effectivement, on aurait pu l’écrire dans les années 80. Aujourd’hui, on est au pouvoir et on assume nos responsabilités. Et on veut continuer à le faire. Je pense qu’aujourd’hui quand on s’inscrit en politique, il faut pouvoir venir avec des solutions, il faut pouvoir les mettre en place. On a plus que jamais besoin de femmes et d’hommes capables de prendre leurs responsabilités, qui sont capables de le faire avec une réelle éthique. On doit absolument revaloriser le politique. Si le politique ne prend pas ses responsabilités, ce seront les technocrates, comme on le voit dans certains pays aujourd’hui, qui le feront sans rendre de compte à personne. Ou pire, des sociétés et des intérêts privés tels que de grands lobbies s’en chargeront. Or, on a vu des exemples catastrophiques dans le domaine de l’alimentation. Ils ne défendent jamais l’intérêt général mais ceux de grands groupes industriels ou parfois financiers,  qui ne prennent pas en considération les risques des décisions qu’ils sont prêts à assumer sur la santé, sur l’humain ou au niveau social. Il faut donc valoriser le politique absolument et les Ecologistes sont là pour le faire aussi.

GL : Jacky Morael dans « La Libre », ce week-end, disait « Ecolo ne rue pas assez dans les brancards » ?

CHD : C’est peut-être une évolution aussi.C’est-à-dire qu’on passe moins de temps à communiquer et à faire des petites phrases telles qu’on les entend encore trop souvent de la part de certains politiques, qu’à essayer de travailler, à construire des solutions et à convaincre les citoyens d’un certain nombre de projets. Une certaine forme de radicalité est peut-être moins présente dans le discours. Mais la radicalité est toujours présente dans nos actions pour apporter davantage de corrections sociales, davantage de supports à l’économie telle qu’elle doit se développer . L’économie est aussi en panne. Pour l’aider, on doit peut-être aussi utiliser les solutions de l’écologie. Dans ce domaine aussi, elle est une intuition magnifique. On doit absolument être dans une société où on valorise la créativité, où on valorise des solutions un peu nouvelles. Je crois que là aussi, les Ecologistes ont une responsabilité à prendre pour défendre, avec leurs partenaires, une nouvelle économie, une économie qui est mise en place déjà, par pas mal de femmes, d’hommes, dans des petites entreprises, dans de toutes petites entreprises. Ils ont besoin d’un coup de pouce pour pouvoir justement développer les solutions de demain. Et c’est aussi un soutien qu’on doit accorder à nos universités, à nos écoles, à nos écoles professionnelles, à nos écoles techniques pour justement mettre en avant cette capacité qu’auront nos jeunes à pouvoir apporter des solutions pour les défis de demain.

GL : Christos Doulkeridis, un coup d’oeil sur l’actualité du jour, les manifestations de la CGSP, du SLFP, pour la Fonction publique, manifestation pour dire non aux réductions d’emploi dans le secteur public, vous leur dites quoi, vous ?

CHD : Je comprends. Quand on regarde un peu ce qui se passe un peu partout en Europe, on constate qu’on utilise la crise économique pour aller surtout dans une direction, celle qui fragilise les Services publics. Il faut sans doute être rigoureux quand on établit les budgets mais il faut en même temps se rendre compte que les Services publics sont essentiels…

GL : Est-ce qu’il faut voter le traité budgétaire européen, est-ce qu’il faut le voter parce que bon, le Sénat la Chambre l’ont fait, les Parlements régionaux doivent encore le faire ?

CHD : Les Régions sont en train de travailler là-dessus mais on ne le fera pas n’importe comment,

GL : Vous êtes à la Région, vous êtes à la Région Bruxelloise, vous allez voter pour ce traité ?

CHD : On ne le fera pas n’importe comment. On a voté en première lecture un texte qui n’est pas exactement le même texte que celui du Fédéral. Même si on doit faire des efforts pour un équilibre budgétaire, il faudrait immuniser un certain nombre de dépenses publiques qui sont justement importantes pour les citoyens. Il faudrait pouvoir continuer à travailler avec les Parlements. Il faut continuer à avoir une concertation avec les partenaires sociaux.  Et donc c’est dans les modalités qu’on prendra notre décision de savoir comment ce texte sera transposé à l’échelle belge. Là aussi, je pense que nous avons une responsabilité, à la fois en tant qu’Ecologistes mais aussi en tant que Belges au niveau européen.

GL : Un dernier mot, en quinze secondes sur l’actualité, le fameux stade de foot bruxellois mais en Région Flamande, André Antoine qui s’en offusque, marche arrière ensuite du Ministre-président bruxellois, c’est quoi, c’est la cacophonie ?

CHD : Il n’y a pas de marche arrière en tout cas du Ministre-président bruxellois. Ce qui est clair, c’est que d’abord il faut arrêter de sur-valoriser cet enjeu du stade de foot. Il est important de pouvoir avoir un stade sans doute européen et de participer à la compétition de 2020 mais pour la Région Bruxelloise en tout cas, il n’est pas question de mettre 1 Euro là-dedans. On a demandé de pouvoir choisir un terrain sur lequel, ce stade pourrait être construit, c’est celui-là qu’on propose. Si on n’en veut pas, on est ouvert évidemment à la discussion.