Diverses questions posées via twitter

La question du nucléaire fait partie de ces débats où 99% des personnes qui s’expriment risquent de le faire sur base d’informations très déficitaires et avec des a priori dogmatiques qui n’aident pas toujours à mener un débat. J’ai conscience de ces deux données et je me donne donc pour obligation d’essayer de rester le plus prudent possible dans ma position. Vous trouverez plus loin des éléments plus techniques ainsi que des renvois à des notes plus détaillées mais voici quelques éléments de réflexion qui me semblent importants. D’abord, j’estime normal, légitime et indispensable de réexaminer la position que les écologistes ont eue sur le développement de l’énergie nucléaire au regard des nouvelles contraintes que nous devons intégrer et qui sont liées au dérèglement climatique lié, notamment, aux énergies fossiles. De fait, la question devient : peut-on se passer du nucléaire, qui semble ne pas produire les mêmes dégâts climatiques que d’autres sources fossiles d’énergie, malgré ses défauts ? Plus particulièrement pour notre pays, une deuxième question peut être posée : la Belgique qui a voté une loi sur la sortie du nucléaire en 2003 a-t-elle raison de revoir le dispositif de cette loi ou non ?

1) Je relève d’abord que la politique du « nucléaire, non merci » portée par les écologistes sur le terrain politique depuis les années 70-80 n’a finalement plus fondamentalement été contestée dès la moitié des années 90, non seulement en Belgique, mais aussi dans la plupart des pays du monde, à l’exception notable de quelques pays ayant très massivement opté depuis des années pour l’énergie nucléaire, telle la France. Cela vaut la peine d’être rappelé : la rareté de la matière première de l’uranium et la dépendance dans laquelle elle nous place, l’impasse face à la question des déchets et l’impossibilité de garantir la sécurité de cette énergie restent totalement à l’ordre du jour malgré la recherche investie de manière ultra-massive sur ces trois enjeux majeurs en Europe et dans beaucoup d’autres pays du monde depuis plus de 50 ans.

2) A la suite de cette réflexion, nous devons encore souligner que si nous en étions il y a encore quelques années à la préhistoire des techniques et technologies relatives à la plupart des énergies renouvelables, c’est justement parce que nous avons investi l’essentiel de nos moyens de recherche dans l’espoir de trouver des solutions aux impasses du nucléaire. On constate le boom en avant de ces énergies depuis quelques années mais surtout le potentiel de progression énorme de ce secteur de sources d’énergie renouvelables, sans oublier le travail qui doit être fait sur la réduction de nos besoins énergétiques via notamment une meilleure isolation ou de nouvelles normes de produits. Deux éléments menacent ces développements : la relance du nucléaire et/ou le coût trop bas du pétrole.

3) La loi de sortie du nucléaire votée en 2003 suite à la participation des Verts au Gouvernement fédéral prévoit l’arrêt des 7 réacteurs belges après 40 années de fonctionnement, c’est-à-dire entre 2015 et 2025. Ce laps de temps – 10 ans de plus que la durée de vie initialement prévue – permet de prendre les mesures nécessaires pour réduire la consommation d’énergie et augmenter la production d’énergies propres et renouvelables. Il s’agit d’une des rares lois votées qui prévoyait dès le départ autant de temps d’adaptation et de mesures de sécurité telles que la « clause de sauvegarde » en cas de menace pour la sécurité d’approvisionnement ou la possibilité de prolonger éventuellement l’une ou l’autre échéance.

4) J’avoue que je ne mets pas sur le même pied les arguments de ceux qui défendent les intérêts financiers du lobby du nucléaire et de ceux qui défendent un intérêt général. Parmi ces derniers, il y a des acteurs qui défendent la poursuite du nucléaire et d’autres évidemment qui contestent cette voie.

5) D’après les informations que j’ai pu obtenir et recouper, il paraît crédible d’affirmer qu’il est possible de fermer les premiers réacteurs nucléaires en 2015 sans risquer un manque d’électricité. En effet, depuis 2003, des investissements importants ont été consentis dans des centrales au rendement élevé (cogénération ou TGV) et dans les énergies renouvelables. De nombreux projets sont en outre en cours de réalisation ou en voie d’initialisation. Ensemble, ces installations permettront de produire plus d’électricité que les 3 plus vieux réacteurs qui doivent fermer d’ici 2015, même en tenant compte d’une augmentation de la consommation d’électricité (qui a diminué de presque 7% entre 2008 et 2009 suite à la crise économique) et de la fermeture éventuelle et souhaitée de certaines centrales à charbon.

Quant à la sortie du nucléaire d’ici 2025, outre le scénario alternatif qui a été présenté par ECOLO en 2005 qui prévoyait cette sortie tout en diminuant les émissions de CO2, une étude du Bureau du Plan de décembre 2008 montre que la Belgique peut atteindre ses objectifs dans le cadre du paquet « énergie-climat » de l’Union Européenne (à savoir une réduction de 15% des émissions de gaz à effet de serre et 13% d’énergie renouvelable pour 2020) tout en sortant du nucléaire, et ce à moindre coût.

Pour aller plus loin : http://web4.ecolo.be/?-Programme-Energie-Climat,332