parlement bruxellois 2La réforme du Code du logement a franchi une nouvelle étape importante. La Commission Logement du Parlement régional bruxellois vient d’adopter le projet de réforme.

Cette année, le code du logement fête ses 10 ans d’existence. Après dix ans, il était nécessaire de confronter notre principale législation aux pratiques du secteur, d’en assurer une meilleure lisibilité après qu’elle ait connu de nombreuses modifications, ainsi que d’y introduire les concepts novateurs que la Région développe.

La réforme a suivi une méthode participative, qui m’est chère, puisqu’une quinzaine d’ateliers thématiques ont réuni représentants du secteur du logement et administrations. Le texte est porteur de nombreuses nouveautés, souvent attendues depuis longtemps par ces acteurs, et de changements qui modifieront parfois en profondeur les outils existants. Parmi les nombreuses modifications apportées à l’ensemble du Code actuel, on peut pointer 30 mesures-phare.

Quels changements en matière de lutte contre l’insalubrité ? Protéger les locataires les plus faibles et mieux distinguer les propriétaires de bonne foi des marchands de sommeil
Pour les propriétaires :
1.    En cas d’amende pour non-conformité aux normes de salubrité, sécurité et hygiène, la moitié de l’amende est suspendue le temps de la réalisation des travaux et ne sera pas réclamée si le propriétaire s’est conformé aux directives de l’Inspection.
2.    Puisque la priorité est la remise sur le marché locatif de logements aux normes, le délai d’exécution des travaux passe de 8 mois à 12 mois renouvelable.
3.    Le code instaure aussi la notion de logement « non-conforme, non-fermé » : lorsque les défauts sont de minime importance et les travaux pour y remédier paraissent disproportionnés, un bien pourra être réputé conforme et remis en location
4.    Les notaires prendront connaissance des cas de fermeture pour insalubrité, afin que les acquéreurs potentiels en soient informés.
Pour les locataires :
5.    Le texte renforce le pouvoir de visite domiciliaire par l’inspection du logement, en instaurant, dans des conditions exceptionnelles et balisées, la visite sans avertissement préalable du propriétaire ou sur autorisation d’un juge de police.
6.    Chasser, le plus souvent illégalement, un locataire de son appartement insalubre pour échapper à la visite de l’inspection et à l’amende sera sans effet : les enquêteurs pourront désormais poursuivre leur travail même si le propriétaire expulse son locataire.
7.    Le Bourgmestre pourra apposer les scellés afin d’éviter qu’un logement dont la fermeture a été décidée, ne soit remise sur le marché locatif, au détriment d’un autre locataire.
Quels changements dans la lutte contre les inoccupés ? Une meilleure opérationnalité des outils existants
Pour les opérateurs publics :
8.    Améliorer la connaissance du parc d’inoccupés, par l’instauration d’un inventaire communal
9.    Les Agences immobilières sociales pourront désormais prendre en gestion publique les biens laissés inoccupés.
Pour les propriétaires  :
10.    Le recours contre l’amende est désormais suspensif et administratif : en cas de recours contre la décision, l’amende ne devra plus être payée avant que le Fonctionnaire délégué ou Conseil d’Etat ait tranché.
11.    Amélioration de la définition d’inoccupation pour améliorer l’efficacité des constats : introduction de la dimension urbanistique et présomptions non limitatives.
Quels changements en matière d’accès aux logements publics ? Homogénéité, transparence et équité
12.    L’obligation de disposer d’un règlement d’attribution, dont le modèle est fixé par le Gouvernement et qui respecte la chronologie des inscriptions ainsi que des critères de priorité prédéfinis, est étendue à tous les opérateurs publics Pour assurer plus de lisibilité et d’homogénéité, le Gouvernement adoptera un règlement-type par opérateur, qui exclura les critères d’attribution discriminatoires.
13.    Les logements communaux seront attribués par une commission d’attribution indépendante, dont la composition et le fonctionnement seront fixés par le Conseil communal.
14.    En cas de recours contre une décision d’attribution d’un logement communal, celui-ci devra être introduit auprès du Collège communal – et non plus le Conseil – afin d’alléger et accélérer la procédure.
Quels changements dans le logement social ? Mixité et participation
Pour les opérateurs publics :
15.    Les sociétés de logement social pourront gérer et mettre en location un pourcentage limité de logements pour les ménages à revenu modéré ou moyen, à la condition stricte et absolue que cela ne diminue pas et n’entrave pas l’augmentation du parc de logements sociaux. Il s’agit notamment d’une réponse au manque de mixité dans les grands ensembles et fait également suite à l’instauration du bail à durée déterminée dans le logement social, afin d’offrir des solutions publiques aux locataires sortants du logement social.
16.    Les dispositifs « pilotes » d’occupation précaire dans les logements sociaux en attente de travaux, lancés sous cette législature, sont reconnus et pérennisés : la Société du Logement de la Région de Bruxelles-Capitale aura désormais pour mission d’encadrer les occupations précaires dans le logement social.
Pour les locataires sociaux :
17.    Les CoCoLo (Conseils Consultatifs des Locataires du logement social) sont dynamisés : leur durée de vie est prolongée à 4 ans, la voix de leurs deux représentants au conseil d’administration de leur société de logement est délibérative, ils se réunissent au moins 4 fois par an et disposent d’un délai prolongé pour rendre leurs avis.
18.    Les mutations vers un logement plus adapté sont encouragées voire obligatoires (plus de deux chambres excédentaires), lorsqu’est proposé un logement adapté à la taille du ménage, présentant les mêmes conditions de confort et situé dans la même commune ou dans un rayon de 5 km.
19.    L’accompagnement des personnes âgées ou handicapées est renforcé en cas de mutation.

Quels changements pour les Agences immobilières sociales ? Renforcement de la participation, de l’accompagnement et de la transparence
20.    Désormais, les AIS devront compter dans leur personnel au moins un gestionnaire diplômé.
21.    L’accompagnement social apporté aux locataires est élargi à de nouveaux acteurs.
22.    Elles devront se doter d’un règlement d’attribution, dont le modèle est fixé par le Gouvernement, et qui tient compte de leur éventuel public-cible
23.    Le code réformé autorise la représentation des propriétaires et des locataires dans les conseils d’administration des AIS.

D’autres concepts novateurs ?
24.    Définition de l’habitat solidaire et intergénérationnel, immeubles occupés par plusieurs ménages, mus par un projet commun ou se rendant des services mutuels.
25.    Reconnaissance de l’épargne collective, qui réunit des personnes qui cotisent en vue de permettre à chacun des membres, par rotation, de payer l’acompte lors de l’acquisition d’un droit réel sur un logement.
26.    Nouveau dispositif d’accès à la propriété : l’Alliance foncière régionale ou « Community Land Trust », organisme qui a pour mission d’acquérir des terrains en vue d’y créer aussi bien des habitations accessibles que des équipements d’intérêt collectif. L’alliance foncière régionale reste propriétaire des terrains mais transfère la propriété des bâtiments aux ménages via des droits réels démembrés. Elle détermine les règles de revente des bâtiments qui doivent permettre que ceux-ci restent toujours accessibles aux familles disposant d’un bas revenu.
27.    L’obligation, pour la SLRB et le Fonds du Logement, de prévoir des objectifs clairs et chiffrés en matière de logement adapté aux personnes handicapées dans leur contrat de gestion.
28.    Des définitions claires, comme le droit au logement décent ou une nouvelle classification de l’offre publique de logement tracent les lignes des nouvelles politiques
29.    Le Fonds du Logement, opérateur de l’accessibilité aux prêts hypothécaires, voit sa possibilité d’octroyer des crédits à taux zéro pour améliorer la performance énergétique des logements confirmée dans le Code.
30.    Lorsque des recours administratifs sont organisés, en matière d’amende ou de fermeture de logement par exemple, le silence de l’administration dans le délai qui lui est imparti ne vaut plus confirmation mais bien infirmation de la décision contestée.

C’est donc une réforme ambitieuse qui vient consolider le principal instrument régional qui encadre les trois axes de la politique du logement : construction, rénovation et innovation. Une réforme qui renforce le cadre qui doit aussi accueillir les futures compétences (bail et fiscalité, notamment) et les projets régionaux novateurs (CLT et habitat collectif, notamment). Je me réjouis de l’accueil et de l’apport de nos parlementaires durant ce riche débat et j’attends avec impatience un vote en séance plénière, pour nous permettre d’affiner encore ces réformes par l’adoption d’arrêtés d’exécution qui seront, eux aussi, soumis au secteur.